Opéra #4 : Moïse et Pharaon par Tobias Kratzer : de l’utilisation mesurée des écrans sur une scène

Le 30 janvier était donnée l'avant-dernière représentation de Moïse et Pharaon de Rossini à l'Opéra National de Lyon, d'après la mise en scène de Tobias Kratzer. Je n'émettrai de critique que pour dire que tout était remarquable, des chanteurs aux décors et à l'orchestre, fougueusement dirigé par Daniele Rustioni.

Bien que réfractaire aux écrans (voir "Opéra #3 : Vivent les gros !"), j'ai même été séduite par l'utilisation qui en a été faite : une utilisation ponctuelle et mesurée, et qui ne consistait pas à filmer les chanteurs en gros plan sous le nez, comme cela semble être la mode en ce moment.

Ainsi, sur deux écrans étroits (semblables aux écrans des smartphones ?) apparaissait la « page Facebook » (en vérité un pastiche de page facebook) titrée « Elégyne, princesse de Syrie », celle que Pharaon veut que son fils Aménophis épouse. Est alors parfaitement campé un personnage de péronnelle de la « haute », posant dans toutes les positions et affichant son engagement politique pour la protection des baleines, rendant très présent, rien que par l'image, un personnage qui ne fera qu'apparaître succinctement.

Ensuite passait en boucle une imitation de journal télévisé, lors duquel défilaient les catastrophes climatiques actuelles, sécheresses, inondations, ouragans, nuées d'insectes et coulées de boues, évoquant les dix plaies d’Égypte infligées par Dieu afin que Pharaon libère les Hébreux.

Enfin, dernier écran, celui de la débâcle des Égyptiens emportés par leur frénésie meurtrière contre les hébreux : film de quelques minutes, projeté sur un rideau blanc recouvrant la scène, montrant la noyade des Égyptiens (non pas en tenu guerrière, mais en tenue de bureau, interprétez par vous-mêmes...), dimension cette fois tragique permettant de nuancer le manichéisme du scénario : la mort des persécuteurs vue sous cet angle nous en montre l'aspect pathétique et bouleversant.