Opéra #2 : Michael Spyres, au-delà de la technique
Le talent de Michael Spyres ne se limite pas à des prouesses techniques, ne tient pas seulement à sa virtuosité de belcantiste confirmé, à la souplesse et à la force athlétiques de sa voix de « baryténor » , à son timbre aux couleurs ambrées comme un miel de montagne, mais il tient aussi, et d'abord, à sa sensibilité plus que manifeste, à une énergie qu'il libère lorsqu'il chante et joue sur scène. Il a le don de rendre ses personnages attachants, comme ce Hoffmann qu'il rend plus touchant que nature dans la version de Laurent Pelly (version de 2013 enregistrée au Liceu de Barcelone). Il semble aussi être un grand expert en grimaces, ce qui n'est pas de refus dans les opéras comiques.
Pendant près d'une décennie, Michael Spyres, dont la voix profonde semblait être celle d'un baryton, s'est démené pour parvenir à avoir une voix de ténor, et c'est en tant que ténor qu'il a atteint sa notoriété actuelle. Pourtant, aujourd'hui, il se considère comme un baryténor, et en effet sa voix naturelle, associée à des années de travail acharné, lui permet de chanter sur plusieurs octaves, d'atteindre des aigus vertigineux et de plonger vers des graves presque abyssaux. Cette immense souplesse lui donne la possibilité de chanter un répertoire dans les tonalités telles qu'elles ont été pensées par les compositeurs.
Je
vous conseille ainsi « Les nuits d'été » de Berlioz (dirigées par John Nelson),
qui viennent de paraître : d'habitude chantées soit par une
soprano (Régine Crespin), soit par un ténor (comme Ian Bostridge)
ou un baryton (Stéphane Degout), Michael Spyres parvient à leur
rendre leurs couleurs d'origine. C'est tout d'abord surprenant parce
qu'inhabituel, mais ensuite on ne peut plus entendre d'autre version
(du moins c'est mon cas) tant celle-ci paraît riche et juste. Il y a
aussi cet opéra comique d'Adolphe Adam, « Le postillon de
Lonjumeau » (mon péché mignon), mis en scène par Michel Fau
(en robe à paniers rose). Mais si vous voulez vous faire une idée de l'étendue de sa
voix, vous pouvez aussi vous référer à son disque « BariTenor »,
où il interprète de nombreux personnages, tels que Figaro dans « Le
barbier de Séville », ou Tonio dans « La fille du
régiment » de Donizetti. Vous pouvez en trouver quelques
extraits ici (dont la chanson de Kleinzach des Contes d'Hoffmann à la minute 11.36).